On estime la population de bisons des Plaines au début des années 1800 à 60 millions en Amérique du Nord. Les bisons couraient dans les plaines de l’ouest de l’Amérique du Nord du Mexique jusqu’au nord du Canada.
Dans leur rapport d’expédition (1804-1806), Lewis et Clark – les chefs de la première expédition américaine à traverser les États-Unis à terre jusqu’à la côte Pacifique – mentionnent avoir vu un troupeau qui s’étendait à perte de vue. L’avènement du chemin de fer permet d’observer des hordes interminables à bord des trains.
En 1865 la population de bisons est estimée à 15 millions. Durant cette décennie, un troupeau de bisons, traversant la voie ferrée pendant sa migration, pouvait immobiliser un train durant plusieurs heures. Admettez que c’est très ennuyeux pour les passagers !
En 1885, on dénombre environ 1000 bisons survivants du million estimé en 1875. Le chemin de fer portera, certes, le flambeau de cette tuerie mais il ne sera pas le seul. L’extinction de la race avait déjà commencé avec le développement du commerce de fourrures au début du 19e siècle.
Autres victimes du déclin du bison d’Amérique, les tribus Amérindiennes qui, après avoir profité de la chasse au bison, connurent la famine, le froid et la dépendance aux Blancs pour leur survie.
Mais revenons dans le passé et voyons la vie dans les plaines de l’Ouest avant l’arrivée des Blancs et la demande de fourrure.
Les Amérindiens et les bisons
Les Amérindiens des plaines tiraient, essentiellement, leur subsistance du bison. Autrefois, bien avant l’arrivée des Blancs, ils chassaient le bison en l’acculant au haut d’une falaise. Le troupeau, pour échapper à ses poursuivants, se jetait dans le vide. En bas de la falaise, les Amérindiennes dépeçaient les carcasses. Une technique utilisée durant plus de 6000 ans. Le Canada possède le site le plus vieux de saut de bisons, classé au patrimoine mondial de l’Unesco.
Les Amérindiens des Plaines utilisaient tout du bison. Vu la rareté du bois, la bouse de bison était ramassée, séchée au soleil, puis servait de combustible. Autre utilisation primordiale, la viande qui était séchée, fumée à la bouse, broyée, mélangée à la graisse de l’animal et à des baies sauvages. Ainsi était fabriqué le pemmican, cette nourriture qui avait la propriété de se conserver très longtemps et qui fut indispensable aux coureurs de bois à venir.
Ces tribus vivaient en autarcie grâce au bison et confectionnaient avec sa peau :
- Mocassins, guêtres, tuniques, toile des tipis, chemises de nuit, manteaux d’hiver, boucliers avec la peau du cou
Du reste de l’animal, elles fabriquaient :
- Outres ou sacs étanches avec les vessies, cordes des arcs avec les tendons, cordes tressées avec les crinières, grattoirs et couteaux avec les os, gobelets avec les cornes, bourres de coussinets pour selles avec les poils, traîneaux et charpentes avec les cages thoraciques, des dés à jouer avec les vertèbres et même des tapettes à mouches avec les queues.
La disparition rapide du bison entraîna des drames dans de nombreuses tribus Amérindiennes qui se virent confrontées à la famine et au froid. Certaines disparurent, d’autres devinrent dépendantes des Blancs et surtout du Gouvernement qui les ravitaillait, entraînant de graves conflits.
Comment en sont-ils arrivés là?
Le cheval fut introduit en Amérique par les Espagnols : cela facilita la tâche des Amérindiens mais la technique restait plus ou moins la même. Ils poursuivaient le bison à cheval et non plus à pied, ils poursuivaient ainsi davantage de bisons vers la falaise.
L’arrivée des coureurs des bois en quête de fourrures changea radicalement la méthode de chasse et contribua au déclin du bison. Les Amérindiens pouvaient troquer le pemmican et les fourrures contre des fusils et de la poudre, des balles par la suite. La chasse devint plus facile, la technique du saut de bison totalement abandonnée et les bêtes furent abattues en plus grand nombre dans un même laps de temps.
Non seulement, la fourrure de l’animal était très en demande, mais, il fallait produire plus de pemmican pour alimenter ces Voyageurs (coureurs des bois) venus de Montréal en canot jusque dans les territoires de l’Athabasca, un voyage de 3 à 4 mois. Ces derniers faisaient provision de viande à l’aller, en prévision du retour vers Montréal l’année suivante. Ils enterraient des ballots à certains campements qu’ils déterraient à leur retour. Un ballot de pemmican fut déterré après 40 ans sous terre par G. Simpson, gouverneur de la Cie de la Baie d’Hudson. On peut lire dans son rapport que la viande était toujours comestible, elle avait juste perdu un peu de saveur !!!
La demande de fourrure toujours croissante et le développement du chemin de fer vont générer un autre type de chasseur.
Certains noms nous sont familiers comme Wild Bill Hickok (le chum de Calamity Jane) ou le tristement célèbre Buffalo Bill (William Frederik Cody) qui se targue d’avoir donné des leçons d’abattage de bisons à l’armée américaine et d’avoir abattu à lui tout seul 4280 bisons en 17 mois. Malheureusement, son adresse à tuer des bisons de son cheval lancé à pleine course s’avère fondée. D’autres lui emboiteront le pas mais Cody restera toujours le « meilleur ».
Les chasseurs ne prélevaient que la peau et la langue, les carcasses pourrissaient dans les prairies. Les os blanchis par le soleil étaient entassés auprès des gares dans les prairies canadiennes et étaient acheminés vers Minneapolis où ils se vendaient 7 dollars la tonne pour être utilisés comme fertilisant.
Depuis le train en marche, les voyageurs étaient invités à tirer sur les bisons. On confiait un fusil à ces Dames de la Haute qui venaient vers l’ouest pour leur apprendre le maniement des armes ou juste les occuper durant ces longues journées ennuyeuses!!!
Des Plaines des USA vers le Canada
Les bisons furent sauvés de l’extermination par quelques éleveurs américains plus sensés que ces tueurs. Le troupeau qui a servi à repeupler les plaines canadiennes provient d’un élevage du Montana. En 1873, Pablo (un Amérindien) et Allard (un Canadien Français) ont acheté à Walking Coyote quelques orphelins qu’ils avaient capturés lors d’une chasse. Au début des années 1900, le troupeau compte plus de 600 têtes. Allard est décédé et Pablo ne peut gérer seul un tel troupeau. La vente du cheptel est proposée au gouvernement américain. Devant le peu d’enthousiasme, Pablo l’offre au gouvernement canadien qui acheta 350 têtes pour la protection de la race et la réintroduction du bison sauvage au Canada.
Le Canada veut repeupler les Parcs Nationaux et se porte acquéreur avec un premier acompte de 40.000 dollars. L’acheminement fut organisé par train jusqu’en Alberta à ELK ISLAND. Un voyage de 52 jours. L’opération dura 3 à 5 ans.
De 1907 à 1912 le Gouvernement canadien prit possession de plus de 700 bisons pour la somme de 200.000 dollars.
À partir de 1923, on transfère 6700 bisons vers Wood Buffalo Park (44.000 Km2) au nord de l’Alberta. Cette opération prendra 4 ans. En 1960 on doit procéder à un abattage à cause de la maladie du charbon. On compte alors 12.000 têtes. Lors de tous ces transferts, des décès sont intervenus parmi les bisons victimes de la myopathie de la capture.
Aujourd’hui, le parc national Wood Buffalo abrite l’un des plus gros troupeaux de bisons en liberté avec autorégulation du monde entier (5000 bisons). C’est également un parc de toute beauté où l’on peut observer, outre les bisons sauvages, descendants des troupeaux qui peuplaient les plaines de l’Amérique du Nord, une faune extraordinaire telle que loups, grues blanches, faucons pèlerins et bien entendu orignaux, lynx, castors et le fameux carcajou, animal assez rusé pour déjouer les pièges des trappeurs mais aussi assez féroce pour que les ours le redoutent.
Ce fabuleux parc est inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, non seulement pour la présence des bisons, mais aussi parce qu’il est le dernier lieu de nidification des grues blanches (espèce menacée), pour la richesse biologique du delta Paix-Athabasca, et pour les vastes plaines salées qui n’existent nulle part ailleurs dans le monde et certains des exemples les plus saisissants de Karsts gypseux de l’Amérique du Nord.
Une visite s’impose. Avis aux amateurs de plein air, randonneurs ou kayakistes car peu de routes dans ce parc afin d’en préserver les richesses naturelles et la beauté sauvage.
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